ALLIANCE DES FORCES DEMOCRATIQUES
POUR LA TRANSITION
(AFDT)
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DECLARATION N°004/2014
Depuis le 05 décembre 2013, notre pays la République Centrafricaine connait un nouveau cycle de violences, jamais vécu par ses filles et fils, avec des manifestations asymétriques à Bangui et à l’intérieur du pays.
A Bangui, quasiment tous les jours, des milices armés de machettes et de mitraillettes se livrent en toute impunité et en bandes organisées à des attaques de certains quartiers de Bangui et de Bégoua. Ces attaques sont souvent suivies d’exécutions sommaires avec des mutilations des corps de victimes, et des pillages. Ces opérations criminelles sont camouflées par des prétextes d’affrontements intercommunautaires alors que leurs motivations sont le vandalisme à grande échelle, la déstabilisation insidieuse de la Transition et la restauration de l’ordre ancien. Les populations civiles, prises au piège au milieu du chaos, ont fui leurs maisons pour se refugier sur des sites jugés plus rassurants.
A l’intérieur du pays, deux situations préjudiciables à l’unité, à la concorde nationale, à la paix, et à la sécurité du pays prévalent :
- D’une part, dans la moitié Est du pays, les combattants de l’ex-coalition Séléka ont repris leurs positions dans les villes et les axes routiers, se substituant à l’Administration dans son ensemble, et particulièrement à l’administration économique et financière;
- De l’autre, dans la partie ouest, c’est au tour des milices Anti-Balakas d’occuper des villes et des axes routiers, suite au retrait des combattants de l’ex-coalition Séléka, se substituant également dans les mêmes conditions à l’Administration.
En clair, notre pays est de fait bien divisé en deux parties, échappant ainsi au contrôle de l’autorité centrale. Les troubles savamment orchestrés tant à Bangui qu’à l’intérieur du pays, ont pour conséquences immédiates le déplacement continu des populations avec leurs conséquences humanitaires, les litanies quotidiennes des massacres collectifs, ainsi que l’arrêt de toutes les activités économiques, administratives et sociales.
Au regard de cette très grave situation, l’AFDT, consciente de ses responsabilités historiques dans le cadre de son engagement à soutenir politiquement le processus de transition en cours, est dans l’obligation de soumettre à l’attention des autorités politiques nationales, ainsi qu’à la communauté nationale et internationale, ces propositions-contributions à court et à moyen terme pour la stabilisation de notre pays.
Compte tenu de ce qui précède, l’AFDT recommande les actions suivantes :
- La totalité des éléments des forces de la police et de la gendarmerie nationales centrafricaines doivent être convoquées, recensées, et rééquipées avec leurs dotations traditionnelles en armement et en logistique, avant d’être immédiatement réaffectées dans les commissariats de police et les brigades de gendarmerie tant à Bangui que dans les villes de province pour travailler, de concert avec les forces internationales, au retour à la sécurité et à la paix. Outre l’avantage de la connaissance du terrain et du milieu humain, le transfert de connaissances et de compétences dont nos forces ont besoin pour leurs missions traditionnelles pourra se faire dans des situations concrètes.
- La même opération, qui a déjà commencé pour les éléments des Forces Armées Centrafricaines (FACA), doit se poursuivre avec leur recensement strict et leur cantonnement fixe dans les casernes, puis leur répartition dans des unités militaires reconstituées. Ces unités reconstituées doivent participer à la sécurisation de Bangui et des villes de province, aux cotés des forces internationales. Cette expérience de terrain accroitra leur aguerrissement et raffermira le processus à venir de renforcement des capacités de nos forces armées nationales.
L’AFDT rappelle que c’est de l’absence de volonté politique des autorités de l’époque dans l’exécution de la Réforme du Secteur de la Sécurité (RSS), pourtant soutenue par la Communauté internationale, qui est à la base de la déliquescence de nos Forces de Défense et de Sécurité.
- L’opération de Désarmement-Démobilisation-Réinsertion- Rapatriement (D.D.R.R) doit être mise en place immédiatement pour prendre en charge dès maintenant toutes les forces non-conventionnelles qui maintiennent une pression médiatique, politique et sécuritaire sur le processus de transition. Seules des opérations efficaces de désarmement et de cantonnement des forces rebelles permettront le retour dans leurs foyers des déplacés internes et des refugiés, le redéploiement de l’administration, la libre circulation des personnes et des biens, la reprise de l’activité économique et les échanges extérieurs vitaux pour notre pays enclavé.
L’AFDT rappelle que ce sont les atermoiements et les prévarications du régime ancien sur le Programme D.D.R. initié en 2008 qui sont à la base de son échec et à la source de la reconstitution des forces rebelles qui se sont finalement emparées du pouvoir de l’Etat. C’est pourquoi, le choix des responsables du Programme D.D.R.R doit s’inspirer de celui de l’Autorité Nationale des Elections, afin de s’assurer de leur intégrité et de leur efficacité.
- L’AFDT remercie les forces internationales MISCA et SANGARIS pour leur abnégation dans la lutte pour la paix dans notre pays et, pour maximiser leurs efforts, l’AFDT soutient l’appel du gouvernement pour la mise en place rapide d’une Opération de Maintien de la Paix (OMP) sous l’égide de l’Organisation des Nations-Unies. La transformation de la MISCA en forces des Nations Unies permettra au peuple et au gouvernement centrafricains de bénéficier de manière optimale de l’expérience et de l’expertise de cette institution afin de parachever la reconstitution rapide et efficace des fonctions régaliennes de l’Etat centrafricain (défense, sécurité, justice, administration, etc.)
- L’AFDT demande la réactivation de la Commission d’Enquête Judicaire mis en place afin de connaitre des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et des crimes économiques perpétrés dans notre pays, car l’impunité est à la base de la situation d’instabilité récurrente dans notre pays. L’AFDT demande à tous les pays amis et frères de la RCA de ne pas servir de refuge ni de tremplin à des criminels notoires et d’aider la justice en RCA, prélude indispensable à tout processus de réconciliation nationale.
- De même l’AFDT condamne fermement les appels à la partition du pays et demande au gouvernement de prendre ses responsabilités, conformément à la loi, en ouvrant systématiquement des enquêtes et procédures judiciaires contre toutes personnes appelant à la division et à la sécession de notre pays, ainsi que contre toutes personnes ou groupes de personnes appelant publiquement à la haine, au meurtre et à l’assassinat collectif d’une partie du peuple centrafricain.
- L’AFDT demande au gouvernement de créer toutes les conditions nécessaires au retour en RCA de tous les étrangers rapatriés dans leurs pays, ainsi que celui de tous nos compatriotes des différentes communautés refugiés, afin de ne pas consacrer une division communautariste aux conséquences incalculables. Il est du devoir de tout centrafricain d’ouvrer en vue de préserver l’unité et l’intégrité de la République centrafricaine.
8- L’AFDT considère comme une priorité absolue le retour des déplacés internes dans leurs foyers respectifs et exhorte le gouvernement à satisfaire cette exigence.
Enfin, l’AFDT présente à nouveau à toutes les familles éprouvées ses condoléances les plus attristées, ainsi que sa compassion pour toutes ces épreuves.
Fait à Bangui, le 6 février 2014
Le Président de la Conférence des Présidents
Martin ZIGUELE