Le Monde.fr avec AFP | • Mis à jour le
Des milliers d'habitants en liesse sont descendus dans les rues de Bangui, vendredi 10 janvier pour laisser éclater leur joie après la démission du président centrafricain Michel Djotodia. Sur les avenues de France, des Martyrs, de l'Indépendance ou encore au carrefour des Nations unies, ils chantaient ou hurlaient en courant sur la chaussée, « c'est fini, c'est fini ! ».
Dans le même temps, au moins quatre blindés français ont pris position près du palais présidentiel de la capitale centrafricaine. Le camp De Roux, où est cantonnée la garde de M. Djotodia depuis le début de l'opération française Sangaris le 5 décembre, se trouve non loin du palais présidentiel et de nombreuses armes lourdes y sont entreposées. Les forces françaises et les détachements de la force africaine (Misca) étaient également très visibles en ville dans l'après-midi.
Le président Djotodia, accusé par la communauté internationale de passivité face aux violences interreligieuses dans son pays, a démissionné au Tchad, sous la pression des dirigeants d'Afrique centrale qui l'y avaient convoqué pour un sommet extraordinaire. Le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, a souhaité un remplacement « dans les plus brefs délais », estimant que « le but, c'est d'alleravant la fin de l'année à des élections ».
« TRÈS FIER DE LA FRANCE ET DU TCHAD »
Au camp de déplacés de l'aéroport de Mpoko, où sont massées 100 000 personnes, majoritairement chrétiennes, venues se placer sous la protection de l'armée française, certains retrouvaient espoir, comme Tertus Ngoutou : « Je suis très fier de la France et du Tchad. J'espère que dès ce soir on pourra de nouveau coexister avec les musulmans », ajoutait-t-il, se disant déterminé à rentrer chez lui avant dimanche.
Avant la démission de Djotodia, plusieurs milliers d'habitants de Bangui avaient manifesté contre son retour en Centrafrique. Aux cris de « Djotodia démission » , les manifestants étaient massés aux abords du quartier de Boy-Rabe, non loin de l'aéroport, sous la surveillance de soldats français et de la Misca.
A Bangui, les tueries à grande échelle de ces dernières semaines ont progressivement cessé et la ville a retrouvé une activité quasi-normale pendant la journée. « La situation s'améliore, lentement, mais elle s'améliore », a estimé jeudi le chef de l'opération française Sangaris, le général Francisco Soriano.
Depuis le renversement en mars 2013 du président François Bozizé par une coalition hétéroclite à dominante musulmane, la Séléka, dirigée par M. Djotodia, la Centrafrique a été emportée dans une spirale de violences communautaires et interreligieuses, qui ont provoqué des déplacements massifs de populations et une crise humanitaire sans précédent dans le pays.
Centrafrique : comment la France a précipité la fin de Djotodia
Le Monde.fr | • Mis à jour le |Par Nathalie Guibert
C'est un communiqué qui l'a confirmé, vendredi 10 janvier à midi, à l'issue de deux jours d'intenses discussions à N'Djamena : le président de transition centrafricain Michel Djotodia, et son premier ministre Nicolas Tiangaye, ont démissionné. Ainsi s'achève le sommet extraordinaire de la Communauté des Etats d'Afrique centrale convoqué par Idriss Déby dans la capitale tchadienne pour tenter de sortir de la crise.
Ce fut un bien mauvais réveillon 2013 que celui passé par Michel Djotodia, le président de transition en Centrafrique. Dans la nuit du 31 décembre, des heurts menacent le camp De Roux où il est retranché à Bangui, et l'ex-rebelle de la Séléka a appelé la force française Sangaris à l'aide. Mais le 1er janvier à 1000 km de là, son sort politique est scellé d'une autre manière. Dans la capitale du Tchad, le président Idriss Déby reçoit Jean-Yves le Drian, le ministre de la défense français.
Car Sangaris est engluée à Bangui, dans une situation toujours explosive un mois après son déploiement. Le grand voisin tchadien de la Centrafrique, lui, voit que la transition politique définie début 2013 sous l'égide de l'organisation qu'il préside, la CEEAC, est dans l'impasse. A Bangui, ses soldats ont bien commencé àpatrouiller avec les Français mais ils sont accusés d'exactions. Sesressortissants sont la cible des violences ; 12 000 ont déjà fui, dont 3 000 dans des avions français.